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L'instabilité de l'épaule - Diagnostic & Bilan

EBP Module
Updated
5/25/2024
Fullphysio
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2 - Diagnostic - Bilan clinique

Une évaluation clinique complète implique :

- 1. l'anamnèse

- 2. l'observation et la palpation pré-examen

- 3. l'examen clinique de base (ECB) et la palpation spécifique des tissus

- 4. des tests supplémentaires : tests de diagnostic, tests de provocation des symptômes, tests de réduction des symptômes, évaluation de la flexibilité des tissus et tests de défaillance des tissus.

- 5. Dépistage de la chaîne cinématique

- 6. Dépistage de la pathologie neurovasculaire

a - Anamnèse (suspicion d'instabilité)


Anamnèse dans le cadre d’une suspicion d’instabilité antérieure

D'un point de vue clinique, il est important de déterminer le mécanisme de la blessure, en particulier après un début traumatique. Une rotation externe-abduction puissante augmente la probabilité de lésions neurovasculaires en cas de luxation antérieure (Cools et al. 2016).

En cas de douleur chronique de l'épaule, il faut déterminer comment les symptômes ont commencé. Ont-ils résulté d'un traumatisme initial ou ont-ils eu un début plutôt progressif ? Les symptômes doivent être interprétés en relation avec la charge de l'épaule (moment de la saison, position jouée dans les sports d'équipe, etc.) Les symptômes récurrents d'instabilité fonctionnelle de l'épaule et de conflit sont souvent liés à la fatigue, à une biomécanique sportive aberrante ou à une augmentation soudaine du volume d'entraînement ou de compétition (Wilk et al. 2002).

Le thérapeute tentera de préciser également :

  • Si le patient a eu recours à une réduction médicalement assistée ou à une réduction autonome.
  • Le temps écoulé depuis l'événement initial, la durée d’immobilisation s’il y en a eu une.
  • La fréquence des événements d'instabilité depuis le moment déclencheur.
  • La perturbation fonctionnelle causée par l'instabilité dans la pratique sportive dans la vie de tous les jours.
  • Les facteurs d’aggravation / d’atténuation de la douleur : Les patients souffrant d’une instabilité antérieure présentent souvent des douleurs qui surviennent en fin de mouvement et ils se plaignent souvent d’une sensation d’instabilité imminente lorsque le bras est en position d’abduction et de rotation externe.
  • Le niveau d’irritabilité du patient : Afin d'identifier l'irritabilité réelle du tissu lésé, demandez au patient (a) s'il peut dormir sur son épaule blessée, (b) si la douleur se situe uniquement au niveau de l'épaule et ne se reporte pas sur le bras ou le coude, et (c) s'il n'y a pas de douleur au repos. Si la réponse est oui à ces trois questions, l'irritabilité est faible, et une mise en charge contrôlée des structures sera autorisée. En revanche, si la réponse à une ou plusieurs des trois questions est négative, l'irritabilité est élevée, ce qui signifie que le traitement initial devra principalement porter sur le contrôle de la douleur et la protection des tissus (Cools. 2021).
  • La présence de douleur nocturne ? Les douleurs nocturnes sont très fréquentes dans les déchirures de la coiffe des rotateurs et les capsulites adhésives. Lorsque le patient signale des douleurs nocturnes, il sera important de lui poser d'autres questions pour distinguer les douleurs spontanées (inflammatoires) des douleurs de compression / mécaniques dues au fait de dormir du côté douloureux, de se coucher dans des positions spécifiques (par exemple le bras au-dessus de la tête) ou en bougeant).
  • Symptômes associés ? Les symptômes sensoriels tels que l'engourdissement ou les picotements doivent être notés, ainsi que tout épisode de "bras mort". Chez l'athlète des sports de lancer, cela peut suggérer une blessure labrale. Il ou elle peut signaler des accrochages, des cliquetis, des blocages ou une incapacité à développer une vitesse normale dans l'action.
  • Le profil psychologique.
  • Le projet du patient.
  • Les examens complémentaires (arthro-scanner, radiographies et IRM) permettant de mettre en exergue les lésions anatomiques au niveau de l’épaule.
  • Le niveau d’activité (y compris les sports avec ou sans contact).
  • Tout traitement antérieur.
  • Les antécédents professionnels et le statut actuel de l’emploi.
  • La main dominante.
  • Tout antécédent de blessure/traumatisme à l’épaule(s) et/ou au cou.
  • Tout antécédent chirurgical pertinent.
  • Les problèmes passés ou présents ailleurs dans la chaîne cinétique, tels que des entorses du genou ou de la cheville, des douleurs au cou ou au bas du dos (Cools 2021).
  • Les comorbidité médicale ou antécédents familiaux de troubles du tissu conjonctif sous-jacents ou d’hyperlaxité généralisée (ex : syndrome d’ehlers danlos)

Plusieurs facteurs dans l’anamnèse peuvent suggérer que la perte de l’os glénoïde est l’étiologie la plus probable de l’instabilité, y compris un événement initial à haute énergie impliquant une charge axiale sur la glène (Burkhart et al. 2000), des plaintes d’instabilité dans les zones médianes du mouvement (20 à 60 degrés d’abduction) (Owens et al. 2011) ou des subluxations récurrentes survenant lors d’activités simples de la vie quotidienne.

Également une suspicion clinique accrue est justifiée dans le cadre d’antécédents de convulsions ou de chocs électriques, de polytraumatisme dans lequel l’instabilité de l’épaule a été négligée ou manquée (Varacallo et al. 2021).

Des cas de subluxations récurrentes à basse énergie peuvent être suspectées si le patient se plaint d’épisodes d’instabilité de l’épaule pendant le sommeil, pouvant indiquer une instabilité plus complexe impliquant une perte osseuse importante (Varacallo et al. 2021).

b - Red flags & Yellow Flags

Il est important, lors du premier dépistage, d'identifier les potentiels drapeaux rouges (McClure et al. 2013). En outre, il convient de s'interroger sur d'autres facteurs associés à la douleur de l'épaule, tels que le diabète, des injections antérieures de corticostéroïdes, une prédisposition génétique, le tabagisme, un dysfonctionnement de la thyroïde, etc.

La diapositive suivante présente certains reds flags potentiels pour l'épaule (McClure et al. 2013).

Le dépistage des drapeaux jaunes est effectué pour déterminer les problèmes psychosociaux tels que le style d'adaptation passif, le comportement d'évitement de la douleur, la peur du mouvement, la catastrophisation de la douleur et la détresse psychologique générale qui peuvent affecter la stratégie de traitement et les résultats. Il existe un lien évident entre les douleurs chroniques et certains facteurs psychosociaux. Bien qu’à l’heure actuelle, la question se pose toujours quant à savoir s’il s’agit de causes ou de conséquences, ces drapeaux jaunes semblent être des indicateurs pronostics de récupération des patients. Par ailleurs, l’évaluation de ces facteurs psychosociaux est préconisée dans les dernières recommandations selon l’HAS.

Quelle est la meilleure manière d’identifier ces drapeaux jaunes ?

Tout d’abord, cela passe par un entretien bien mené entre le thérapeute et le patient. Il conviendra de privilégier des questions ouvertes, d’adopter une écoute active, d’utiliser si possible des questionnaires (il est toutefois déconseillé d’utiliser ces questionnaires dès la première séance), d’observer attentivement le comportement du patient (communication non verbale). Bien entendu, ce dépistage demande du temps. Tout ne se fait pas en l’espace d’une seule séance. Plusieurs consultations sont nécessaires pour mettre en évidence ces facteurs psychosociaux et ainsi agir dessus (Enquête Delphi. 2021).

c - Observation et palpation pré-examen

L'inspection générale du patient doit inclure l'évaluation des cicatrices chirurgicales antérieures en cas d’intervention chirurgicale, des déformations et de l'atrophie musculaire. Le muscle deltoïde présente souvent une atrophie dans les cas de luxations chroniques, atrophie qui se caractérise par la proéminence de l'acromion et l'écrasement de l'épaule. Cette atrophie du deltoïde peut être due à une lésion du nerf axillaire. Les résultats peuvent être assez subtils, en particulier chez les patients obèses (Varacallo et al. 2021).

Une atrophie au-dessus de l'épine scapulaire peut indiquer une lésion du supra-épineux. Une atrophie isolée de l'infra-épineux peut indiquer un piégeage du nerf supra-scapulaire au niveau de l'encoche spino-glénoïde. Il faut également évaluer la scapula pour voir si elle est ailée (Owens et al. 2011).

Le kiné procédera ensuite à une palpation pré-examen, destinée à vérifier l’atrophie musculaire, le gonflement, la température et l’état trophique général de la peau et c’est tout pour l’instant ! Il est en effet déconseillé d’effectuer toute palpation spécifique à un tissu avant l’examen pouvant influencer les résultats de l’examen clinique.

d - Examen clinique de base (ECB) et palpation spécifique des tissus

Il faut ensuite procéder à un examen clinique de base (ECB), composé de mouvements actifs et passifs et de tests de résistance.

Les mouvements actifs consistent en une flexion avant dans le plan sagittal, une abduction dans le plan frontal, une élévation dans le plan scapulaire, une rotation externe fonctionnelle (main au cou) et une rotation interne fonctionnelle (main derrière le dos).

Le thérapeute vérifiera l'amplitude du mouvement (ROM), la douleur, la qualité du mouvement et les compensations de la chaîne cinétique. Il est important de noter que tout mouvement douloureux peut constituer un marqueur dans l’évaluation de la réduction des symptômes. Le thérapeute peut, à partir de ces mouvements douloureux, venir mettre en évidence l’implication de la tête humérale ou de la scapula dans la reproduction des symptômes. Également lorsque, dans le traitement, nous tenterons de faire de la « modulation de symptômes », ces mouvements douloureux pourront permettre d’évaluer l’efficacité de la techniques employées.

Il sera également important de noter à quel moment du mouvement le patient ressent les douleurs.

Le kinésithérapeute se placera également à l’arrière du patient pour observer spécifiquement les mouvements de la scapula.

1 - Mouvements actifs

Dans le cas où le patient est particulièrement douloureux, l’évaluation de la mobilité active avec les Aires de July peuvent constituer un outil intéressant : permettent de déterminer une aire de mobilité du membre supérieur en fonction de trois niveaux : supérieur, moyen et inférieur, ainsi que quatre secteurs : latéral, médial, antérieur et postérieur. Aucun mouvement de niveau supérieur n’est possible. Les mouvements main/taille, main/poche homolatérale, main/poche arrière et main/poitrine sont réalisables.

2 - Mouvements passifs

Le kinésithérapeute pourra ensuite procéder à un examen passif comprenant une flexion avant, une abduction, une rotation externe en position neutre, une rotation interne en position neutre et une adduction horizontale. Le thérapeute sera attentif à l’amplitude de mouvement (ROM), à la douleur, à la résistance aux mouvements passifs et à la sensation d’arrêt (dur ? mou ?).

La perte de ROM et/ou la douleur pendant l'examen passif indique une lésion articulaire, capsulaire ou ligamentaire ou une raideur des muscles environnants. La douleur lors d'une adduction horizontale forcée peut refléter une pathologie de l'articulation AC, un conflit coracoïde ou une irritation des bourses séreuses. L'hypermobilité, en particulier en rotation externe, peut être un indicateur d'hyperlaxité ou d'instabilité multidirectionnelle. L’évaluation spécifique d’une hyperlaxité sera développée dans le point 4.

3 - Tests de résistance

Pendant l'examen de résistance, une résistance isométrique est donnée contre la flexion avant, l'extension, l'abduction et l'adduction, la rotation externe et interne, la flexion et l'extension du coude, le tout avec l'épaule en position neutre.

La douleur ou/et la faiblesse constatées peuvent refléter une lésion du système musculo-tendineux. Une douleur sans faiblesse est souvent le résultat d'une tendinopathie, alors que la faiblesse est le résultat d'une déchirure musculaire ou tendineuse. Cependant, il faut savoir que le patient peut présenter une inhibition musculaire protectrice en cas de blessure avec une forte irritabilité, ce qui peut conduire à un faux diagnostic de déchirure musculaire. Dans ce cas, les tests de résistance seront faibles et douloureux. Une faiblesse sans douleur peut être le résultat d'une déchirure complète mais asymptomatique (par exemple la rotation externe dans une déchirure totale de l'infraspinatus), d'une faiblesse spécifique au sport du patient (rotateurs externes dans les sports de lancer), ou d'un problème neurologique (par exemple une abduction faible due à une lésion du nerf axillaire).

Chez le patient plus âgé, un examen complet de la coiffe des rotateurs doit être effectué car plus de 50 % des patients âgés de plus de 40 ans développent une déchirure de la coiffe des rotateurs à la suite d'une luxation de l'épaule, et l'incidence continue d'augmenter avec l'âge (Simank et al. 2006).

4 - Sans oublier la force de préhension ?  

Il pourra également être intéressant d’évaluer la force de préhension de la main avec un dyamomètre manuel. En 2016, Horley et son équipe ont constaté une forte corrélation entre la force de préhension et la force des rotateurs latéraux. Les auteurs suggèrent que l'évaluation de la force de préhension pourrait être utilisée comme moniteur de la fonction de recrutement de la coiffe des rotateurs (Horley et al. 2016).

En 2021, Manske et al. ont indiqué dans leur étude que la force de préhension ne s'est pas avérée corrélée avec les déchirures de la coiffe des rotateurs (Manske et al. 2021).

En 2022, Tourabi et al. ont indiqué dans leur étude que la force de préhension est fortement associée à la force de la coiffe des rotateurs chez les patients atteints d’instabilité atraumatique de l'épaule (IAE). Les auteurs concluent que la force de la poignée isométrique est rapide et facile à tester et pourrait donc fournir un moyen pratique de donner une mesure objective de la force de la coiffe des rotateurs ; cependant, une faible résistance seule n'est pas un indicateur d’IAE (Tourabi et al. 2022).

5 - Palpation spécifique

Après l'examen clinique basique, le thérapeute pourra procéder à une palpation plus spécifique en fonction de l'hypothèse envisagée. L'examinateur doit vérifier systématiquement la sensibilité du supra-épineux, de l'infra-épineux, du tendon du sous-scapulaire, de la ligne de l'articulation AC et du tendon du long chef du biceps (LHB), ainsi que la douleur myofasciale dans le trapèze supérieur, le releveur de l'omoplate, le petit pectoral, l'infra-épineux et les rhomboïdes. La palpation s'est avérée avoir une sensibilité et une spécificité similaires à celles de certains tests cliniques typiques ; cependant, la précision dépend des compétences de l'examinateur en matière de palpation (Toprak et al. 2013). Puisque les tests supplémentaires, décrits ci-dessous, ont souvent tendance à irriter ou à empiéter sur les tendons, il est conseillé d'effectuer la palpation après le BCE et avant les tests spéciaux. Répétez la palpation spécifique des tissus à la toute fin de l'examen. Envisagez une irritation des tissus sur la base de l'examen clinique si le patient signale une douleur accrue à la palpation après l'examen.

La palpation de la ceinture scapulaire peut fournir des informations précieuses. La sensibilité de la face antérieure de l'articulation gléno-humérale est fréquente chez les patients présentant une instabilité antérieure

e - Tests supplémentaires

Tests supplémentaires : tests de diagnostic, tests de provocation des symptômes, tests de réduction des symptômes, évaluation de la flexibilité des tissus et tests de défaillance des tissus.

1 - Évaluation de la laxité articulaire

Pour évaluer la laxité par rapport à l'instabilité, il faut examiner l'épaule controlatérale à la recherche de similitudes, ou pour détecter une hyperlaxité ou une instabilité multidirectionnelle. Par ailleurs, l'hypermobilité devra également être évaluée au niveau des autres articulations du corps.

Sur base des 5 tests de laxité articulaire proposés par Carter et Wilkinson (Carter et al. 1964), le thérapeute peut effectuer un examen généralisé de la laxité articulaire à la fois des membres supérieurs et des membres inférieurs :

  • Apposition passive du pouce sur la face palmaire de l'avant-bras
  • Hyperextension passive des doigts qui viennent se placer parallèlement à la face dorsale de l'avant-bras
  • Hyperextension du coude supérieure à 10°
  • Hyperextension du genou supérieure à 10°
  • Dorsiflexion passive excessive de la cheville et éversion du pied

De manière générale, un point est attribué à chaque composante avec un score total sur cinq pour chaque côté. Un score de plus de 3 points incluant les articulations des membres supérieurs et inférieurs est généralement fixé comme critère de laxité articulaire généralisée Carter et al. 1964 ; Morita et al. 2017).

Pour rappel, les sujets présentant une laxité accru de l'articulation de l'épaule sont plus enclins à l'instabilité lors d'événements traumatiques mineurs (Lewis et al. 2004). De nombreuses études ont rapporté la présence d'une hyperlaxité articulaire généralisée chez les patients présentant une instabilité antérieure de l'épaule (Dubs et al. 1988 ; Caplan et al. 2007 ; Cooper et al. 1992).

Dans leur étude de 2017, Wataru et al. soulignent la difficulté de l'évaluation de la laxité de l'épaule par un seul test. L'avantage de combiner plusieurs tests cliniques a été discuté dans le diagnostic de l'instabilité de l'épaule (Farber et al. 2006 ; van Kampen et al. 2013) et devrait également être discuté pour la laxité de l’épaule l'épaule (Wataru et al. 2017).

Pour détecter une hyperlaxité de l’articulation gléno-humérale, le thérapeute peut effectuer plusieurs tests comme le test d'hyper-abduction de Gagey, le sulcus test, le test du tiroir antéro-postérieur modifié et le test de RE en R1.

2 - Tests de provocations

Des tests provocateurs doivent être utilisés pour évaluer l’instabilité de l’épaule comme l’ « apprehension test »,  le « relocation test » et le « surprise test ».

En position d'appréhension, l'épaule est placée passivement en rotation externe maximale et en abduction horizontale avec le patient en décubitus dorsal.  Une douleur à la face antérieure de l'épaule évoque un syndrome de conflit sous-acromial ;  la douleur à la face postérieure implique un conflit glénoïdien postéro-supérieur.  Il peut être nécessaire de changer la position en plus ou moins d'élévation/d'abduction pour provoquer des symptômes subtils chez l'athlète overhead, selon le type de sport.  Dans le « relocation test », le thérapeute effectue manuellement un glissement dorsal sur la tête humérale en position d’appréhension. Le test est positif si la douleur manifestée lors du test d’appréhension disparaît.  Le « relocation test » nous permet d'identifier un conflit primaire - basé sur la structure - versus secondaire - basé sur la fonction.  Si le test est positif, cela signifie que les plaintes du patient sont secondaires, basées sur une translation antérieure excessive de la tête humérale.  Un test négatif évoque un conflit primitif ou structurel, indépendant de la position arthrocinématique de la tête humérale.  En cas de « relocation test » positif, le « surprise test » peut être effectué.  L'examinateur libère soudainement la main de l'épaule après « relocation test ».  Le test est considéré comme positif lorsque la douleur typique revient et confirme un conflit fonctionnel secondaire.

Test d'appréhension :

Relocation test :

Surprise test :

Récemment, le Supine Moving Apprehension Test (SMAT) a été conçu pour évaluer spécifiquement la capacité à contrôler les charges d'instabilité antérieure de l'épaule (Rabin et al. 2023).

Concernant les tests de l’épaule liés à une pathologie de la coiffe des rotateurs, nous vous conseillons de visionner la vidéo suivante :

Par exemple, en cas de suspicion de déchirure de la coiffe des rotateurs, l'examinateur peut effectuer un certain nombre de tests spécifiques pour l’infra épineux.

D'autres encore peuvent aider à mettre en évidence une lésion du subscapulaire :

3 - Tests d'implication de la scapula

L'implication scapulaire dans les douleurs de l'épaule peut être examinée par le test d'assistance scapulaire (SAT) et le test de repositionnement scapulaire (SRT).

Le SAT, dans lequel la qualité du mouvement scapulaire est examinée, consiste en une assistance manuelle du mouvement correct de la scapula pendant l'élévation du bras. La réduction de la douleur pendant ce mouvement par rapport à la non-assistance confirme l'implication de la scapula dans les plaintes de l'épaule.

Dans le SRT, où la stabilité scapulaire est examinée, l’Empty-can est effectué pendant que le kinésithérapeute stabilise la scapula et l'épaule du patient dans une position de rétraction en plaçant l'avant-bras le long du bord médial de la scapula. Le test est positif lorsque la douleur initiale, présente dans la position de l’Empty-can, disparaît pendant le SRT. Comme la valeur diagnostique de ces tests pour la pathologie de l'épaule est faible, ils doivent être considérés comme des tests de réduction des symptômes plutôt que des tests diagnostiques (Cools. 2021).

À noter que le SAT et le SRT peuvent tous deux être utilisés comme test de réduction des symptômes pour tout mouvement, position ou test supplémentaire douloureux pendant l'examen, à condition que pour le SAT, un mouvement dynamique soit requis (ex : main au cou…) et pour le SRT, une contraction isométrique soit effectuée (ex : RE isométrique, Full can…) (Cools. 2021).

4 - Intégration du SSMP

Jeremy-Lewis  (Lewis et al. 2009 ; 2015).

C'est une procédure qui est très populaire mais il faut bien comprendre que toutes ces procédures cherchent globalement la même chose et notamment à mettre en évidence les problèmes de mobilité du patient.

Plus spécifiquement, Lewis appelle cette méthode le SSMP pour Shoulder Symptom Modification Procedure. Il cherche à évaluer systématiquement l'influence de la posture thoracique, des 3 plans de la posture scapulaire (et des combinaisons de positionnement scapulaire), et de la position de la tête humérale (à l'aide d'une batterie de tests) sur les symptômes de l'épaule (Lewis et al. 2009). Également, les régions vertébrales cervicales et thoraciques sont passées au crible pour déterminer leur influence sur les symptômes (Lewis et al. 2009).

Dans un premier temps, l’étape 1 consiste à identifier les mouvements, activités ou postures aggravants pertinents (généralement 1 à 3) qui reproduisent les symptômes.

Comme le souligne Lewis, il est difficile de déterminer avec certitude quelle altération des symptômes est cliniquement significative et le SSMP s'en remet au patient pour faire cette détermination (Lewis et al. 2015).

Il sera en effet important de bien communiquer avec le patient pour que ce dernier puisse signaler ce qui est important pour lui, comme l'amélioration des mouvements et des fonctions, la diminution de la douleur, la réduction des paresthésies et une plus grande sensation de stabilité.

Par conséquent, si un patient signale une amélioration suite à l’une des procédures du SSMP, cette procédure sera utilisée pour guider le traitement. Concernant la douleur, l’auteur indique que dans le cadre de cette procédure SSMP, les patients ressentent souvent une amélioration lorsqu’ils atteignent une diminution d’au moins 30 % de leur douleur. Bien entendu, Lewis fait remarquer que cela varie d’un individu à l’autre (Lewis et al. 2015).

En quoi consiste les procédures du SSMP ?

Les premières procédures du SSMP visent à évaluer l'influence de l'augmentation et de la diminution de la cyphose thoracique sur les symptômes présentés. À titre d’exemple, si l’abduction d’épaule sur un arc douloureux est identifié comme un des principaux mouvements provocateurs, Jérémy Lewis va chercher à savoir si l’extension thoracique active, et éventuellement la flexion influence directement les symptômes lors de l’abduction de l’épaule dans l’arc douloureux. (Lewis et al. 2015).

L’auteur s’adapte aux types de mouvements douloureux :

Dans le cas où le patient se plaint d’une activité simple (simple abduction de bras par exemple), Lewis demande au patient de placer un doigt sur le sternum et de l'utiliser comme guide pour effectuer une extension active du thorax. Une fois réalisée, le patient est invité à maintenir cette position et à répéter le mouvement d’abduction de l’épaule initialement douloureux.

Dans le cas où le mouvement est plus exigeant (ex : pompes, services au tennis / volley-ball, natation), Lewis suggère d’utiliser un ruban adhésif pour tenter de maintenir la colonne thoracique en extension (Lewis et al. 2015).

Si cette manoeuvre thoracique diminue les symptômes de 100%, Lewis suggère que l’évaluation n’a pas besoin d’aller plus loin et que le traitement mettra l’accent sur une combinaison de sensibilisation posturale, d'exercices (y compris le contrôle moteur pendant l'activité provocatrice) et de thérapie manuelle (pour assurer une conformité adéquate des articulations et des tissus mous) (Lewis et al. 2015). Dans ce scénario, l'objectif du traitement est d'améliorer l'extension thoracique, en particulier pendant la ou les activité(s) provocatrice(s) identifiée(s).

Si les procédures thoraciques ne soulagent pas ou seulement partiellement les symptômes, Lewis propose d’évaluer alors les changements de symptômes secondaires aux procédures scapulaires. L’auteur suggère que si le mouvement est relativement simple, ces procédures scapulaires peuvent être réalisées manuellement.

En revanche, si l'activité est plus exigeante et que la stabilisation manuelle n'est pas possible, il est proposé de se servir d’une bande athlétique type kinésiotape ou strappe dans le but de tenter de modifier la position de la scapula. À l'heure actuelle, il semble ne pas y avoir de consensus concernant l'approche la plus efficace pour déterminer l'influence de la scapula sur les symptômes présentés, avec la facilitation (Kibler et al. 1998), le taping (Lewis et al. 2005) et les techniques de repositionnement (Lewis et al. 2009).

Comme le souligne Lewis, l’objectif de ces procédures scapulaires dans le SSMP n'est pas d'assister ou de faciliter le mouvement de la scapula, mais de la repositionner avant l'initiation du mouvement.

Pour ce faire, le thérapeute place doucement la scapula dans une nouvelle position de départ dans un des trois plans de mouvement et dans des combinaisons de ces plans, et permet à la scapula de se déplacer à partir de cette nouvelle position de départ sans aide. De cette manière, le thérapeute peut déterminer si une position ou une combinaison de positions diminue les symptômes. Par exemple, positionner la scapula dans une position d'élévation et de bascule postérieure et permettre à la scapula de se déplacer activement à partir de cette position peut être bénéfique pour une personne. Pour une autre, il peut s'agir de commencer à partir d'une position plus rétractée ou plus basculée postérieurement. Chez d'autres, le repositionnement de la scapula ne modifie pas les symptômes et ne serait alors pas inclus dans la prise en charge (Lewis et al. 2015).

Dans le cas où ces manœuvres diminuent les symptômes du patient, le thérapeute pourra mettre en place une prise en charge composée d’exercices et de thérapie manuelle destinés à modifier le contrôle moteur la scapula conformément aux résultats de l’évaluation.

Si les procédures scapulaires ne soulagent pas complètement les symptômes, le thérapeute évalue ensuite les effets des procédures de la tête humérale. L'objectif de ces procédures est d'influencer positivement les symptômes du patient en appliquant des techniques visant à décoapter, élever ou faire glisser la tête humérale vers l'avant ou vers l'arrière.

Comme pour les procédures thoraciques et scapulaires, les procédures de la tête humérale qui améliorent significativement les symptômes sont utilisées pour guider le traitement.

Bien entendu, il peut être judicieux de tenter une combinaison de procédures. Lewis souligne en effet que dans de nombreux cas, des combinaisons de procédures thoraciques, scapulaires et de la tête humérale peuvent aider à résoudre les symptômes.

Si le thérapeute suggère la présence d’une tendinopathie de la CR sur base de l’examen clinique, comme des antécédents de charge accrue et la présence de douleurs et de faiblesses principalement identifiées lors de la rotation externe et de l'élévation de l'épaule (suggérant l'implication du sus-épineux, de l'infra-épineux et du petit rond), et que le PSSM ne soulage pas complètement les symptômes, un programme de mise en charge graduelle de la coiffe des rotateurs est ajouté aux composantes du PSSM s’est révélé bénéfique (Lewis et al. 2009).

Une attention particulière doit être accordée au déficit d'amplitude de mouvement en rotation interne glénohumérale (GIRD), à l'amplitude totale de mouvement (TROM)

5 -Le GIRD

5.1  Définition du GIRD

Les athlètes pratiquant des sports avec les bras au-dessus de la tête, comme les joueurs de volley-ball, peuvent présenter une altération de la mobilité et de la souplesse de l’articulation gléno-humérales (GH) au niveau de l’épaule dominante, ce qui entraîne une rotation médiale (RM) beaucoup moins importante et une rotation latérale (RL) plus importante, classée comme déficit de rotation interne gléno-humérale (GIRD ) (Rose et al. 2018 ; Keller et al. 2018 ; Baltaci et al. 2001 ; Almeida et al. 2013 ; Noonan et al. 2015).

Deux types différents de GIRD ont été décrits : anatomiques et pathologiques.

Le GIRD anatomique a été décrit comme une perte de moins de 18 à 20 ° de RM gléno-humérale par rapport à l’autre côté ou bien une différence de moins de 5° lorsqu’on compare l’arc de rotation gléno-humérale totale (par exemple, somme de la RE + somme de la RM) de l’épaule impliquée avec l’autre épaule.

Le GIRD pathologique a été identifié comme une perte de rotation médiale gléno-humérale supérieure à 18–20 ° avec une perte correspondante de la rotation totale supérieure à 5 ° observée dans l'épaule de lancement par rapport à l’autre épaule (Rose et al. 2018 ; Manske et al. 2013).

5.2 Evaluation clinique du GIRD

Dans un premier temps, l'évaluation du GIRD est effectuée en mesurant l'amplitude de la rotation médiale de l’articulation glénohumérale, de préférence en position couchée sur le dos, avec l'épaule en abduction à 90° et la scapula stabilisée contre la table.

L'évaluation goniométrique / inclinométrique ainsi que l'interprétation de la sensation d’arrêt (mou / dur) sont décrites comme des critères d'évaluation du GIRD. Comme nous l’avons mentionné ci-dessus, une différence de 18-20° entre les 2 côtés est considérée comme positive pour le GIRD (Cools et al. 2016). Cependant, compte tenu d'un possible déplacement de l'amplitude de rotation dû aux adaptations osseuses, le GIRD peut être associé à un gain de l'amplitude de rotation latérale.  

Par conséquent, il est impératif de mesurer la rotation médiale ainsi que la rotation latérale, en interprétant l'amplitude totale du mouvement (TRM).

Notez que pour la mesure de la RM, le thérapeute fixe la scapula en palpant la coracoïde avec le pouce et l'épine de la scapula avec les doigts, en contrôlant le mouvement scapulaire en bascule antérieure. L'application de la main sur la tête humérale pour fixer l'épaule contre la table n'est pas conseillée, car elle pourrait éventuellement influencer la cinématique gléno-humérale (glissements dorsaux), modifiant ainsi la ROM. Pour la RL, aucune fixation externe n'est nécessaire, puisque la scapula repose sur la table. En plus de la mesure en position d'abduction, une évaluation supplémentaire du GIRD avec l'épaule en flexion avant de 90° peut même donner au clinicien une meilleure impression de la raideur postérieure, car il y a davantage d'étirement sur la face postérieure de l'épaule. Sur la diapositive suivante, la main de fixation évite une élévation excessive du sommet de l'épaule pendant la RM de l'épaule.

5.3 Comment survient ce GIRD ?

Il est couramment admis que le GIRD est dû à une adaptation, on ne naît pas avec un GIRD. Il semblerait que la répétition de mouvements de lancer fréquents (sur des années) puisse engendrer certaines adaptations de l’épaule. Par exemple, des adaptations osseuses ont pu être observées et associées à l’apparition d’un GIRD (Wilk et al. 2010 ; 2012).

En effet, la répétition de mouvement de lancer et plus particulièrement chez des jeunes sportifs en pleine maturation, peut engendrer une réaction de l’os et créer une adaptation structurelle. Les résultats ont montré que ces athlètes peuvent présenter une rétroversion de la tête humérale avoisinant les 12° en moyenne (Whiteley et al. 2009).

Certaines études parlent même d’une rétroversion de 17°, d’autres 10°…(Crockett et al. 2002). Quoiqu’il en soit, cette rétroversion de 12° n’est pas un élément sur lequel nous autres kinésithérapeutes devons et pouvons agir. De plus, si notre patient présente simplement une rétroversion de la tête humérale de 12°, il présentera probablement un déficit de RM de 12°, ce qui ne constitue pas un GIRD pathologique en soit selon les définitions sus-mentionnées.

Généralement, dans la pratique clinique, on retrouve ces GIRD chez des jeunes athlètes qui pratiquent très fréquemment des sports de lancer depuis leur plus jeune âge. À noter également qu’il sera inutile de vouloir à tout prix savoir si notre patient présente ou non une rétroversion de la tête humérale dans la mesure où les imageries sont à éviter le plus possible chez cette population.

En fin de compte, cette rétroversion de 12° en moyenne, ne semble pas expliquer à elle seule le GIRD pathologique (GIRD pathologique = une différence de 18-20° entre les 2 côtés).

Le déficit de RM restant pourrait être expliqué par la musculature postérieure, qui peut devenir tendue en raison des contractions et des forces musculaires excentriques élevées (microtraumatismes répétitifs) au cours de la phase de décélération du mouvement de lancer (Wilk et al. 2010 ; 2012).

f - Dépistage dela chaîne cinématique

L’évaluation de la chaîne cinématique comprend 2 composantes distinctes : (1) évaluer les troubles et déficits de la chaîne cinématique, quels que soient les symptômes du patient au niveau de l'épaule et (2) évaluer l'implication de la rupture de la chaîne cinématique dans les symptômes de déficience du patient.

Quelle que soit la pathologie de l'épaule, le dépistage de la chaîne cinétique est primordial, en particulier chez les sportifs “overhead”.  

Le dépistage rapide des variables de chaîne cinétique consiste en :

• l'observation des courbes vertébrales et de la posture générale (posture de la tête vers l'avant, hyperlordose du rachis cervical, hypercyphose et épaules en protraction, hyper- ou hypolordose du rachis lombaire, position fléchie des hanches, position du genou en valgus ou varus, position du pied, etc.)

• Test de descente latérale (lateral step down) : observez la stabilité des hanches et du tronc

• Squat profond bilatéral : observez la qualité du mouvement, les mouvements répétitifs pour évaluer la force et l'endurance des membres inférieurs

• Amplitude du tronc en rotation, flexion et extension

• Amplitude des hanches, en particulier dans l'extension et la rotation

Le clinicien peut utiliser certains protocoles de test spécifiques, tels que le “Functional Movement Screen", “la Performance Matrix", ou un programme de dépistage standardisé similaire, en examinant aussi bien la ROM que la force et la stabilité et aussi bien le tronc que les extrémités. Cependant, il convient de préciser que l'utilité et l'efficacité de bon nombre de ces protocoles sont très discutables et non étayées par des preuves scientifiques.  

Un dépistage structuré approfondi de l'association entre les troubles de la chaîne cinétique et les symptômes du patient peut être effectué à l'aide de la procédure de modification des symptômes de l'épaule (SSMP) (Lewis et al. 2016). Nous développerons ce concept plus loin dans ce module.

g - Dépistage de la pathologie neurovasculaire

En fonction des antécédents et des résultats de l'examen clinique de base, le clinicien peut être amené à réaliser des tests spécifiques supplémentaires à ceux décrits dans la section précédente. En particulier, un examen neurologique, neurodynamique et/ou vasculaire peut être nécessaire en cas de suspicion, par exemple, de syndrome du défilé thoracique (STO) ou de pathologie neurodynamique du membre supérieur.  

L'épreuve de Roos est un test raisonnablement sensible et spécifique pour les STO et facile à réaliser :

Pour l'examen neurodynamique, des tests neurodynamiques de base du membre supérieur (ULNT) peuvent être réalisés, évaluant la mécanosensibilité du système nerveux dans le quart supérieur.

L'atteinte cervicogénique de l'épaule doit être évaluée par un dépistage du rachis cervical et des tests diagnostiques différentiels. Cependant, l'examen des conditions pathologiques et des déficiences plus proximales dépasse le cadre de ce module (cf : module cervicalgie).

h - Diagnostic de la luxation antérieure

Il est quasiment impossible de passer à côté d’une luxation antérieure. Elle est donc souvent diagnostiquée cliniquement compte tenu de son aspect classique.

Les patients présentent normalement le bras en adduction et en rotation interne, montrant une perte du contour deltoïde normal (Watson et al. 2016). Un sillon postérieur ou un vide gléno-huméral peut être visible, et la tête humérale peut être palpable en avant. Les radiographies peuvent être utilisées pour confirmer le diagnostic, ainsi que pour visualiser les dommages concomitants à l'os.

En général, les radiographies avant la réduction de l'épaule ne sont pas nécessaires sauf si l'une des trois conditions suivantes est remplie :

  • âge supérieur à 40 ans
  • première luxation
  • mécanisme traumatique de la blessure

Si ces 3 facteurs sont négatifs, il existe une valeur prédictive négative de 96,6 % pour la fracture associée (Émond et al. 2004).

Les radiographies standards pour aider aux diagnostics initiaux, ou dans l'évaluation post-réduction, sont les suivantes : vues antéro-postérieures en rotation neutre, externe et interne, une vue latérale ou « Y » dans le plan scapulaire et une vue axillaire (Pollock et al. 1993). La tomodensitométrie (TDM) n'est pas systématiquement utilisée au départ, sauf pour mieux évaluer la perte osseuse chez les luxations primaires, si une intervention chirurgicale est nécessaire. Une angiographie TDM pour identifier une possible lésion vasculaire.

L'IRM est la meilleure imagerie pour les pathologies des tissus mous, telles que les lésions du labrum, du nerf axillaire ou de la capsule de l'épaule, mais elle est rarement utilisée car l'anamnèse et l'examen physique fournissent la plupart des informations essentielles (Pollock et al. 1993).

i - Scores et questionnaires

Cliniquement, les échelles et scores sont utilisés à diverses fins. Premièrement, avant l'intervention à des fins de pronostic, pour évaluer l’état général et fonctionnel du patient,  éventuellement pour permettre la classification des patients en sous-groupes significatifs et pour définir les objectifs de traitement (Davies et al. 1994 ; Kramer et al. 2006).

Deuxièmement, pendant l'intervention pour surveiller la progression de l'état, détecter les changements et faciliter la communication avec les patients et les autres professionnels de la santé (Greenslade et al. 2004 ; Bot et al. 2005).

Enfin, après intervention pour déterminer l'efficacité, l'efficience et la rentabilité de l'intervention donnée (CSP, 2012 ).

De nombreuses échelles et scores associées aux douleurs d’épaules sont décrits dans la littérature.

Parmi eux nous pouvons retrouver :

1 - Les échelles et scores spécifiques à l’épaule

- Le score de Constant : permet une évaluation fonctionnelle de l’épaule sur une échelle de 0 à 100. Sont évalués la douleur (15 points), le niveau d’activité quotidienne (10 points), le niveau de travail avec la main (10 points), la mobilité (40 points) et la force musculaire (25 points).

- Le Simple Shoulder Test (SST) : questionnaire composé de 12 questions à réponses fermées oui/non évaluant la douleur et la fonctionnalité de l’épaule chez les patients présentant une atteinte de la coiffe, de l’arthrite ou une arthroplastie.

- Le SPADI (Shoulder Pain and Disability Index) (Breckenridge et al. 2011) : Non disponible en français, il s’agit d’un questionnaire auto-administré englobant deux dimensions : la douleur et les activités fonctionnelles. Prenant 5-10 minutes pour la réalisation, il a été approuvé dans l’évaluation de l’épaule.

2 - Les échelles et scores spécifiques de l’instabilité

  • Le score ISIS (développé dans la 1ère partie) pourra être utilisé pour aider les chirurgiens dans la sélection du « bon » patient pour l’intervention de Bankart sous arthroscopie dans l’instabilité antérieure récidivante de l’épaule (Balg et al. 2007). Il est souvent admis qu’un Bankart sera recommandé si le score n’est pas très important (ISIS ≤ 3), si par exemple il s’agit d’un patient non sportif. Si le patient est un sportif en revanche, la butée de Latarjet sera souvent préférée (ISIS ≥ 6).  
  • Le score de Rowe est l'outil le plus fréquemment utilisé dans la littérature sur l'instabilité de l'épaule (Fayad et al. 2005). Il comporte trois items portant sur la stabilité (50 points), la mobilité (20 points) et la fonction (30 points) de l'épaule. Le score global saisi par le médecin est considéré comme excellent lorsqu'il va de 90 à 100 points, bon de 75 à 89 points, moyen de 51 à 74 points et mauvais en dessous de 50 points (Rowe. 1978). Une étude de 2015 a montré que le score de Rowe fournit le lien le plus fort entre l'appréhension de l'épaule et les altérations au niveau cérébral (Cunningham et al. 2015).
  • Le score de Walch et Duplay : le plus utilisé actuellement en Europe pour l'évaluation du patient subissant une chirurgie de stabilisation de l'épaule (Edouard et al. 2010). Cependant, il ne s'agit pas d'un questionnaire auto-administré. Il est composé de quatre items : activité, stabilité, douleur et mobilité. Selon le score de Walch-Duplay, les résultats ont été classés comme excellents (91 et 100 points), bons (76 et 90 points), passables (51-75 points) ou mauvais (moins de 50 points).
  • Le WOSI : Le Western Ontario Shoulder Instability Index (WOSI) est un auto-questionnaire spécifique mesurant l’impact fonctionnel des patients atteints d’instabilité chronique scapulo-humérale. Il est composé de 21 questions séparées en 4 domaines : symptômes physiques/douleurs, sport/loisir/travail, mode de vie et émotions (Perrin et al. 2017). Les réponses se font sous la forme d’une Échelle Visuelle Analogique (EVA) entre 0 mm (pas de gêne) et 100 mm (gêne maximale). Le score global est obtenu par la somme des différents items, soit de 0 (meilleur score) à 2100 (moins bon score). Il est simple d’utilisation (remplissage estimé à 3 minutes), validé, fiable, reproductible et sensible au changement, et il a été validé en plusieurs langues. Depuis 2017, il a été validé en Français par l’équipe de Perrin (Perrin et al. 2017).
  • L'OSIQ : Le score d'instabilité de l'épaule d'Oxford (OSIQ) est une mesure autodéclarée des résultats pour les patients souffrant d'instabilité de l'épaule (Dawson et al. 1999). Ce questionnaire de 12 items contient cinq catégories de réponses pour chaque question. Dans le système de notation original, les réponses étaient notées de 1 à 5 points et résumées en un score total allant de 12 (le moins déficient) à 60 (le plus déficient). Le système de notation a été révisé en 2009, conformément à la notation révisée de l'Oxford Shoulder Score (OSS), qui provient du même institut (Dawson et al. 2009). Dans le système de notation révisé, les réponses étaient notées de 0 à 4 et la note était inversée ; ainsi, le score total variait de 0 (le plus altéré) à 48 (le moins altéré).
  • Le MISS : Le Melbourne Instability Shoulder Score (MISS) est un outil auto-administré qui a été développé en 2004 (Watson et al. 2005). Il y a un total de 100 points et certaines questions ne font pas partie du système de notation. Certains auteurs pensent que le MISS offre un plus large éventail de questions relatives aux tâches fonctionnelles et l'instabilité que les instruments WOSI, DASH ou ASES (Plancher et al. 2009). Ils pensent que ces autres systèmes de notation peuvent ne pas refléter réellement l'état fonctionnel complet des patients et peuvent sous-estimer l'affaiblissement des patients.

3 - Les échelles et scores spécifiques aux facteurs psychologiques

  • L'échelle de kinésiophobie de Tampa (TSK) est un questionnaire auto-administré qui mesure les croyances et les comportements liés à la douleur, en se concentrant particulièrement sur les croyances selon lesquelles la douleur est dommageable et les mouvements douloureux doivent être évités (Kori. 1990). Les propriétés psychométriques de la TSK ont été confirmées pour différents troubles de la douleur (Woby et al. 2005).
  • The Pain Catastrophizing Scale est un questionnaire auto-administré mesurant l’étendue de pensées et de sentiments catastrophiques (menace amplifiée, pensées ruminantes et sentiment d'impuissance) associés à la douleur que les individus peuvent ressentir. Une fiabilité interne élevée a été rapportée chez les patients souffrant de douleur chronique avec une validité et une fiabilité test-retest adéquates (Sullivan et al. 1996).

Enfin pour terminer, l'échelle "Patient-Specific Functional Scale" est particulièrement intéressante à utiliser chez les patients. On demande simplement au patient d’identifier les mouvements qui lui posent problèmes et d'évaluer sa douleur sur une échelle de 0 à 10 lors de ces mouvements. Au fur et à mesure de la prise en charge, on va pouvoir réévaluer ces mouvements et constater l’évolution.

j- Quelles classifications ?

Au terme de ce bilan clinique, si votre hypothèse d’épaule instable est toujours votre hypothèse principale, vous pourrez classer votre patient dans une / ou plusieurs catégories que nous avons mentionné dans la première partie à savoir :

  • TUBS : instabilité unidirectionnelle traumatique avec lésion de Bankart, pour laquelle une intervention chirurgicale est souvent nécessaire
  • AIOS : instabilité acquise due au syndrome de surcharge
  • AMBRI : instabilité multidirectionnelle atraumatique avec laxité bilatérale, dans laquelle la rééducation est obligatoire, mais en cas d’échec, une intervention chirurgicale peut être réalisée

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