L’instabilité chronique de cheville est l’un des principaux problèmes après un épisode d’entorse latérale de cheville. La littérature montre qu’après une entorse de cheville jusqu’à 40% des personnes peuvent développer de l’instabilité chronique de cheville. La compréhension de l’instabilité chronique de cheville a évolué au fil des années. Au terme de cette masterclass, vous aurez une meilleure compréhension de l’instabilité chronique de cheville avec les différents déficits qui lui sont associés. Visionner cette masterclass vous permettra d’améliorer vos connaissances sur le plus récent modèle décrivant l’instabilité chronique de cheville.
L'instabilité chronique : Le principal
On ne peut pas parler d’instabilité chronique de cheville sans parler d’entorse de cheville. En particulier les entorses latérales, sont parmi les blessures musculosquelettiques les plus courantes. Environ 40% des personnes ayant subi une entorse latérale de cheville développent une instabilité chronique, ce qui contribue à un taux élevé de récidive et peut même conduire à une arthrose précoce.
La banalisation de l'entorse de cheville
Une entorse latérale de cheville est une blessure traumatique du complexe ligamentaire latéral de la cheville, résultant d'une inversion excessive de l'arrière-pied ou d'une combinaison de flexion plantaire et d'adduction. Elle implique généralement une atteinte du ligament talo-fibulaire antérieur, parfois associée au ligament calcanéo-fibulaire. Malgré sa prévalence élevée, elle est souvent banalisée, ce qui peut entraîner un sous-dépistage si les patients ne mentionnent pas leurs antécédents d'entorse lors de l'anamnèse. Il est donc crucial de poser des questions spécifiques sur les antécédents d'entorse de cheville, tant pour les patients présentant des problèmes de cheville que pour ceux ayant des problèmes aux membres inférieurs.
La confusion entre entorse et dérobement
Une confusion fréquente est observée entre l'entorse latérale de cheville et le dérobement de cheville. L'entorse latérale de cheville implique une atteinte du complexe ligamentaire, résultant d'une inversion excessive de l'arrière-pied. En revanche, le dérobement ou le lâchage de cheville se réfère à un épisode incontrôlé et imprédictible d'inversion excessive de l'arrière-pied, sans atteinte ligamentaire associée.
Définition
L'instabilité chronique de la cheville survient après un épisode traumatique d'entorse aiguë, et pas seulement un dérobement. La définition de cette instabilité a évolué au fil du temps. Initialement, seule une instabilité mécanique était reconnue, mais les travaux de Freeman en 1965 ont introduit la notion d'instabilité fonctionnelle, mettant en avant l'importance des exercices de coordination post-entorse. Les recherches ultérieures, telles que celles de Troop en 1985, ont confirmé l'instabilité mécanique et ont mis l'accent sur le contrôle sensorimoteur et l'atteinte des fibres nerveuses dans la capsule. Dans les années 2000, les modèles ont intégré la perception de l'instabilité, ainsi que la distinction entre l'épisode d'entorse et le dérobement. Plus récemment, le modèle d'Hertel a évolué pour décrire les déficits contribuant à l'instabilité chronique de la cheville, abandonnant les notions abstraites d'instabilité mécanique et fonctionnelle. L'intérêt de parler de déficit, c'est qu'en kinésithérapie on va pouvoir agir sur ces déficits.
Modèle de l'instabilité chronique de cheville
Selon le modèle proposé par Hertel, l'instabilité chronique de la cheville survient au moins un an après une entorse latérale de cheville. Trois grands types de déficits peuvent se développer : les déficits patho-mécaniques, les déficits sensori-perceptifs et les déficits du comportement moteur. Ces déficits peuvent être influencés par des facteurs personnels et environnementaux, contribuant à divers degrés d'instabilité chronique. Les patients peuvent présenter des instabilités graves avec des entorses à répétition. Des instabilités moins sévères, avec juste des sensations de lâchage et de dérobements qui sont gênantes, ou des patients “coper”, qui ont complètement récupéré les fonctions de leur cheville.
Déficits patho-mécaniques
Dans les déficits patho-mécaniques, on retrouve la laxité pathologique, les restrictions arthrocinématiques et ostéocinématiques, ainsi que les blessures tissulaires et les adaptations tissulaires secondaires à l'entorse de cheville.
Déficits sensori-perceptifs
Les déficits sensori-perceptifs incluent la douleur, la diminution de la proprioception (la capacité de sentir sa cheville dans l'espace), la perception de l'instabilité, la kinésiophobie, la diminution de la fonction perçue et de la qualité de vie. Ces déficits peuvent être évalués à l'aide de questionnaires pour mesurer un certain niveau de douleur, d'instabilité perçue etc.
Déficits du comportement moteur
Les déficits du comportement moteur comprennent l'inhibition neuromusculaire, l'altération des réflexes et des faiblesses musculaires. On peut également noter des problèmes de contrôle postural dynamique et statique, ainsi qu’une altération des mouvements lors des activités fonctionnelles et une réduction de l'activité physique.
Facteurs personnes et environnementaux
Ces trois grands groupes de déficits chez les personnes présentant une instabilité chronique de la cheville vont être influencés par des facteurs personnels tels que la démographie, l'histoire médicale, le nombre d'antécédents d'entorse, les attributs physiques et le profil psychologique. De plus, les facteurs environnementaux, tels que la demande physique et sportive, les contraintes familiales et professionnelles, les déplacements, le soutien social et l'accès aux soins de santé, jouent également un rôle important dans la gestion et le traitement de cette condition.
Profil d'instabilité chronique individuel
Le modèle original du profil d'instabilité chronique de la cheville est complexe et comprend une multitude de déficits possibles. Chaque individu présente un profil d'instabilité qui lui est propre. Les kinésithérapeutes doivent donc identifier les déficits modifiables sur lesquels ils peuvent intervenir dans le contexte global de l'instabilité chronique. Cela nécessite l'intégration d'évaluations spécifiques pour individualiser les programmes de rééducation.
Conclusion
Pour conclure, le modèle d'instabilité chronique de la cheville proposé par Hertel et Corbett met en lumière les différents déficits potentiels associés à cet état après une entorse latérale de cheville. Ces déficits sont influencés par des facteurs personnels et environnementaux, ce qui nécessite une approche individualisée dans la rééducation. L'évaluation du patient est donc essentielle pour adapter les interventions de manière spécifique, permettant ainsi un traitement optimal.