Jusqu’à une personne sur deux sera atteinte de douleur à l’épaule dans sa vie. De ceux-ci, 50% seront toujours symptomatiques six mois après leur première consultation en soins primaires.
Une prise en charge des douleurs à l’épaule selon les données probantes est nécessaire pour éviter que la douleur devienne chronique. Cependant, le diagnostic et le traitement des douleurs à l’épaule peuvent varier en fonction de la présentation clinique.
Durant cette Masterclass, les recommandations actuelles les plus récentes dans la prise en charge des tendinopathies de la coiffe des rotateurs, de la déchirure aiguë transfixiante de la coiffe des rotateurs, de la capsulite rétractile et de l’instabilité gléno-humérale traumatique seront présentées.
Plus précisément, nous aborderons dans cette Masterclass, les critères diagnostiques, les recommandations d’imagerie et de référence à un médecin spécialiste, les traitements médicaux ainsi que les traitements en réadaptation, recommandés pour ces quatre problématiques communes à l’épaule.
Mise en contexte
Aujourd'hui, je vais partager avec vous les recommandations actuelles en matière de prise en charge des diverses problématiques courantes de l'épaule, afin d'améliorer les pratiques cliniques relatives aux douleurs à cette articulation.
Pour commencer, je vais présenter le contexte des douleurs à l'épaule, puis je vais passer en revue les recommandations pour l'évaluation de ces douleurs. Ensuite, je vais aborder les recommandations spécifiques pour la prise en charge de la tendinopathie de la coiffe des rotateurs, de la déchirure transfixiante de la coiffe des rotateurs, de la capsulite rétractile, ainsi que de l'instabilité antérieure gléno-humérale.
La prévalence des douleurs à l'épaule est significative, touchant jusqu'à 55 % des adultes à un moment de leur vie. De plus, la moitié de ces patients continueront à ressentir des symptômes six mois après leur première consultation en soins primaires. Ces douleurs entraînent une perte de fonction importante et ont un impact financier considérable sur le système de santé ainsi que sur la productivité. Par conséquent, une prise en charge basée sur des données probantes est essentielle pour optimiser les résultats cliniques.
Dans le cadre de mon doctorat, notre équipe a développé un guide de pratique clinique sur le diagnostic et la prise en charge des adultes présentant des problématiques de coiffe des rotateurs. Cependant, d'autres affections peuvent également être responsables de douleurs à l'épaule. Afin d'intégrer des recommandations pour ces problématiques, nous avons mené une revue systématique des guides de pratique clinique sur le diagnostic et la prise en charge de diverses problématiques courantes à l'épaule, telles que la capsulite rétractile et l'instabilité antérieure gléno-humérale.
Évaluation du patient
Donc, lors de l'évaluation et de la prise en charge des problèmes courants à l'épaule, il est recommandé de mener un examen subjectif et objectif approfondi pour établir un diagnostic en physiothérapie. Dans l'examen subjectif, il est essentiel d'évaluer les antécédents médicaux du patient, de recueillir des informations détaillées sur la blessure et de poser des questions sur les symptômes de douleur à l'épaule. L'examen objectif comprend l'observation de la posture et de la région de l'épaule, ainsi qu'une évaluation générale de la région cervicale. Il est recommandé d'évaluer les amplitudes articulaires actives et passives, la force musculaire et de réaliser des tests spécifiques. Pendant cet examen, il est important d'identifier les drapeaux rouges, qui signalent des problèmes nécessitant une référence médicale, ainsi que les drapeaux jaunes, qui orientent la sélection des interventions thérapeutiques.
Drapeaux rouges et jaunes
Les drapeaux rouges associés aux douleurs à l'épaule comprennent des signes tels qu'une déformation suspecte, un œdème important, un érythème cutané, des déficits sensitifs ou moteurs importants et inexpliqués, de la fièvre ou des frissons pouvant suggérer une atteinte cancéreuse, ainsi qu'une histoire ou une suspicion de cancer, des signes indiquant une atteinte cardio-vasculaire ou viscérale, et des signes suggérant une arthrite inflammatoire. Il est essentiel d'évaluer attentivement la présence de ces signes et symptômes chez le patient.
En ce qui concerne les drapeaux jaunes, ils représentent principalement des facteurs psychosociaux associés à un pronostic moins favorable. Cela inclut une durée prolongée des symptômes et une intensité élevée de la douleur, qui ont été démontrées comme étant liées à un pronostic défavorable. Les facteurs liés au travail, tels qu'une demande d'indemnisation tardive, la présence d'un litige ou d'une insatisfaction au travail, peuvent également indiquer un pronostic moins favorable. De plus, la détresse psychologique, l'anxiété, la kinésiophobie, le sentiment d'injustice lié à la lésion, le manque de soutien social et les responsabilités familiales sont des facteurs à prendre en considération lors de l'évaluation d'un patient présentant des douleurs à l'épaule.
La tendinopathie de la coiffe des rotateurs
La tendinopathie de la coiffe des rotateurs est la pathologie la plus courante à l'épaule, représentant entre 65 et 85 % des cas de douleurs à l'épaule. Ce terme englobe un continuum de lésions allant de la tendinose de la coiffe des rotateurs à la déchirure partielle de la coiffe des rotateurs. Il peut également inclure des diagnostics tels que la douleur sous-acromiale, le syndrome d'accrochage et la bursite sous-acromiale. Bien que ces conditions puissent représenter différentes pathologies, le terme de tendinopathie de la coiffe des rotateurs est utilisé car la prise en charge est souvent similaire pour toutes ces affections.
Lors du diagnostic en physiothérapie de la tendinopathie de la coiffe des rotateurs, il est recommandé de passer par les différentes étapes d'évaluation mentionnées précédemment. Cependant, certains auteurs ont identifié des tests spécifiques dont les résultats combinés peuvent fournir des indications quant à la présence de la pathologie. Ces indications sont généralement exprimées en termes de ratio de vraisemblance positive et négative.
Dans le cas de la tendinopathie de la coiffe des rotateurs, une combinaison de l'arc douloureux, du test de Hawkins-Kennedy et du test de l'infra-épineux peut fournir une bonne indication de la présence de cette pathologie. De plus, si ces tests donnent des résultats négatifs, il y a une probabilité raisonnable que la pathologie soit absente. Ainsi, ces tests peuvent être des outils précieux pour aider à confirmer le diagnostic de tendinopathie de la coiffe des rotateurs.
Dans le cas d'une tendinopathie de la coiffe des rotateurs, les recommandations cliniques suggèrent de ne pas recourir à une imagerie diagnostique en première intention. Cela est dû au risque de découvrir des anomalies fortuites qui pourraient entraîner des références inutiles et des délais dans la prise en charge, augmentant ainsi le risque de chronicité. De même, la référence pour une opinion chirurgicale n'est pas recommandée initialement.
En ce qui concerne la prise en charge médicamenteuse, l'acétaminophène et les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) sont recommandés, mais il est essentiel de prendre en considération les contre-indications du patient. Les infiltrations de corticostéroïdes ne sont pas recommandées en première intention, mais peuvent être utilisées si la douleur persiste malgré les autres traitements. Cependant, après deux infiltrations sans amélioration significative, une infiltration additionnelle n'est pas recommandée.
Pour la prise en charge en réadaptation, l'éducation du patient revêt une importance primordiale. Cela peut inclure des informations sur l'anatomie de l'épaule, la neurophysiologie de la douleur, la modification des activités, la gestion de la douleur, la gestion du stress et l'importance d'un mode de vie actif.
En physiothérapie, un programme de réadaptation actif est recommandé, comprenant des exercices de mobilité articulaire, de contrôle moteur, de renforcement et d'endurance. La thérapie manuelle peut également être bénéfique pour soulager la douleur et améliorer la fonction, idéalement combinée à un traitement actif. Cependant, l'électrothérapie n'est généralement pas recommandée dans la prise en charge de la tendinopathie de la coiffe des rotateurs.
La déchirure transfixiante de la coiffe des rotateurs
Pour la déchirure transfixiante ou déchirure complète de la coiffe des rotateurs, les outils diagnostiques et les ratios de vraisemblance jouent un rôle important. Pour une déchirure de la coiffe des rotateurs, le fait d'avoir un patient âgé de plus de 65 ans présentant une faiblesse en rotation externe et des douleurs nocturnes donne une bonne probabilité de déchirure de la coiffe des rotateurs. Cependant, un résultat négatif à ces tests ne permet pas d'exclure la pathologie.
Quant à la déchirure transfixiante de la coiffe des rotateurs, le fait d'avoir un patient âgé de plus de 60 ans avec un arc douloureux positif, un test du drop-arm positif et un test de l'infra-épineux positif suggère une bonne probabilité de diagnostic positif. En revanche, l'absence de ces facteurs donne une bonne indication que le patient n'a pas de déchirure transfixiante de la coiffe des rotateurs.
En cas de suspicion de déchirure transfixiante de la coiffe des rotateurs, notamment en présence d'un traumatisme, plusieurs mesures sont recommandées. Tout d'abord, il est conseillé de procéder à une imagerie pour confirmer le diagnostic. Ensuite, une référence à un orthopédiste pour une évaluation chirurgicale est recommandée lorsque la déchirure transfixiante est confirmée à l'imagerie et que le patient présente des douleurs, une incapacité ou une faiblesse musculaire importante.
Il est particulièrement important de référer rapidement les patients présentant des traumatismes, les jeunes patients, ceux qui ont des exigences physiques importantes au travail, ainsi que ceux chez qui l'imagerie montre une absence de signes de dégénérescence musculaire, comme l'absence d'infiltration graisseuse, et ceux ayant une rupture massive. La rapidité de la référence est essentielle pour garantir que ces patients bénéficient d'une chirurgie dans les meilleurs délais afin de minimiser les complications et la progression de la déchirure.
En termes de prise en charge des déchirures de la coiffe des rotateurs, la même médication que la tendinopathie de la coiffe est recommandée. Toutefois, il est important de noter que les infiltrations intra-articulaires de corticostéroïdes ne sont pas recommandées en première intention. Même si le patient est référé pour une imagerie et une consultation avec un spécialiste, il est crucial de fournir une éducation au patient et de lui proposer un programme de réadaptation active.
La capsulite rétractile
La capsulite rétractile, également connue sous le nom d'épaule gelée, présente des recommandations distinctes par rapport aux affections précédentes. Sa prévalence dans la population générale est de 2 à 5 %, mais elle peut atteindre jusqu'à 20 % chez les personnes diabétiques. Les femmes, surtout âgées de 40 à 65 ans, sont plus susceptibles d'être affectées. Les facteurs de risque de capsulite primaire, dite “idiopathique” incluent le diabète, les problèmes de thyroïde, la goutte, l'hyperlipidémie, la maladie de Parkinson et les antécédents de capsulite dans l'épaule opposée. Les cas de capsulite secondaire sont souvent associés à un traumatisme ou à une immobilisation.
La capsulite rétractile présente une présentation clinique souvent décrite en plusieurs phases, parfois en trois, parfois en quatre. Généralement, ces phases sont divisées en une phase chimique, caractérisée par une douleur prédominante par rapport à la raideur, et une phase mécanique, où la raideur devient plus prépondérante que la douleur.
La capsulite rétractile se manifeste par une progression de la douleur et de la raideur articulaire, limitant les activités quotidiennes et le sommeil. Il n'y a pas de tests spécifiques comme aux autres pathologies où une combinaison va nous donner des ratios de vraisemblance que la pathologie soit présente ou non. Les patients présentent généralement une perte progressive de la rotation externe passive et de la mobilité dans d'autres mouvements, tels que l'abduction et la rotation interne. Le diagnostic différentiel est crucial parce qu'on sait qu’elle peut être confondue avec une tendinopathie aiguë comme il y a peu de perte de mobilité articulaire au début de la capsulite. L'histoire du patient est également très importante pour exclure les traumatismes graves et les maladies sévères, comme les néoplasmes. On peut, par contre, faire une palpation qui va nous permettre d'identifier des crépitements qui seraient indicateurs d'ostéoarthrose. L'imagerie médicale peut être controversée, certaines recommandations suggèrent de ne pas en faire, tandis que d'autres indiquent qu'une radiographie négative peut contribuer au diagnostic en éliminant d'autres pathologies telles que l'arthrose. Un nouveau guide de pratique clinique sur la capsulite est en préparation dans le JOSPT, ce qui pourrait clarifier les recommandations concernant l'imagerie médicale pour cette condition.
Pour la capsulite rétractile, les traitements médicaux recommandés incluent l'analgésie avec de l'acétaminophène et des anti-inflammatoires non-stéroïdiens oraux. Les infiltrations de cortico-stéroïdes intra-articulaires sont préconisées précocement, idéalement pendant la phase chimique pour limiter la perte de mobilité. La chirurgie, telle que la manipulation sous anesthésie et l'arthrolyse capsulaire, est réservée aux cas de traitement non-chirurgical infructueux. La physiothérapie, comprenant l'éducation du patient, des exercices supervisés et de la mobilité à domicile, ainsi que la thérapie manuelle, peut être bénéfique. Il est essentiel de noter que la capsulite rétractile a souvent une évolution naturelle sur deux ans et que les interventions, outre l’infiltration, vont plus ou moins modifier le pronostic à long terme. L'accent est donc mis sur l'éducation du patient, la prescription d'exercices à domicile et la gestion de cette pathologie qui a une certaine évolution naturelle.
L'instabilité gléno-humérale antérieure
Finalement pour l'instabilité antérieure gléno-humérale, c'est la luxation la plus fréquente de l'articulation, représentant 45% de toutes les luxations corporelles, sachant que 95% de toutes les instabilités gléno-humérales sont antérieures. La récurrence de la luxation antérieure est courante, avec un taux de 39%, et les hommes de moins de 40 ans présentant une hyperlaxité sont particulièrement à risque de récidive.
En ce qui concerne la prise en charge médicale, une imagerie diagnostique est recommandée dans deux situations : premièrement, après une première luxation antérieure traumatique chez un jeune patient à risque de récidive, et deuxièmement, en cas de luxation récurrente. L'objectif est d'identifier rapidement les patients pour lesquels une intervention chirurgicale pourrait être nécessaire afin de prévenir de nouvelles luxations et des lésions osseuses plus graves.
En ce qui concerne les traitements médicaux et de réadaptation, en cas de douleur, l'administration d'acétaminophène et d'anti-inflammatoires non-stéroïdiens oraux peut être recommandée. Pour le traitement conservateur, l'éducation du patient est primordiale. En cas de proximité avec le traumatisme, une immobilisation peut être suggérée, avec un programme de réadaptation actif pour favoriser la récupération.
Conclusion
En résumé, lors de l'évaluation clinique initiale des problèmes d'épaule, il est recommandé d'examiner les antécédents médicaux, l'historique de la blessure et de procéder à une évaluation subjective et objective. Dans la plupart des cas, l'imagerie diagnostique n'est pas recommandée en première intention, sauf en cas de traumatisme. De même, la référence pour une intervention chirurgicale n'est généralement pas recommandée en première intention. En ce qui concerne le traitement médical, l'utilisation d'acétaminophène et d'anti-inflammatoires non-stéroïdiens par voie orale est recommandée, tandis que les infiltrations de corticostéroïdes sont généralement évitées en première intention. Pour la prise en charge en physiothérapie, il est recommandé de fournir une éducation au patient, un traitement de physiothérapie et des exercices actifs.
Jusqu’à une personne sur deux sera atteinte de douleur à l’épaule dans sa vie. De ceux-ci, 50% seront toujours symptomatiques six mois après leur première consultation en soins primaires.
Une prise en charge des douleurs à l’épaule selon les données probantes est nécessaire pour éviter que la douleur devienne chronique. Cependant, le diagnostic et le traitement des douleurs à l’épaule peuvent varier en fonction de la présentation clinique.
Durant cette Masterclass, les recommandations actuelles les plus récentes dans la prise en charge des tendinopathies de la coiffe des rotateurs, de la déchirure aiguë transfixiante de la coiffe des rotateurs, de la capsulite rétractile et de l’instabilité gléno-humérale traumatique seront présentées.
Plus précisément, nous aborderons dans cette Masterclass, les critères diagnostiques, les recommandations d’imagerie et de référence à un médecin spécialiste, les traitements médicaux ainsi que les traitements en réadaptation, recommandés pour ces quatre problématiques communes à l’épaule.
Mise en contexte
Aujourd'hui, je vais partager avec vous les recommandations actuelles en matière de prise en charge des diverses problématiques courantes de l'épaule, afin d'améliorer les pratiques cliniques relatives aux douleurs à cette articulation.
Pour commencer, je vais présenter le contexte des douleurs à l'épaule, puis je vais passer en revue les recommandations pour l'évaluation de ces douleurs. Ensuite, je vais aborder les recommandations spécifiques pour la prise en charge de la tendinopathie de la coiffe des rotateurs, de la déchirure transfixiante de la coiffe des rotateurs, de la capsulite rétractile, ainsi que de l'instabilité antérieure gléno-humérale.
La prévalence des douleurs à l'épaule est significative, touchant jusqu'à 55 % des adultes à un moment de leur vie. De plus, la moitié de ces patients continueront à ressentir des symptômes six mois après leur première consultation en soins primaires. Ces douleurs entraînent une perte de fonction importante et ont un impact financier considérable sur le système de santé ainsi que sur la productivité. Par conséquent, une prise en charge basée sur des données probantes est essentielle pour optimiser les résultats cliniques.
Dans le cadre de mon doctorat, notre équipe a développé un guide de pratique clinique sur le diagnostic et la prise en charge des adultes présentant des problématiques de coiffe des rotateurs. Cependant, d'autres affections peuvent également être responsables de douleurs à l'épaule. Afin d'intégrer des recommandations pour ces problématiques, nous avons mené une revue systématique des guides de pratique clinique sur le diagnostic et la prise en charge de diverses problématiques courantes à l'épaule, telles que la capsulite rétractile et l'instabilité antérieure gléno-humérale.
Évaluation du patient
Donc, lors de l'évaluation et de la prise en charge des problèmes courants à l'épaule, il est recommandé de mener un examen subjectif et objectif approfondi pour établir un diagnostic en physiothérapie. Dans l'examen subjectif, il est essentiel d'évaluer les antécédents médicaux du patient, de recueillir des informations détaillées sur la blessure et de poser des questions sur les symptômes de douleur à l'épaule. L'examen objectif comprend l'observation de la posture et de la région de l'épaule, ainsi qu'une évaluation générale de la région cervicale. Il est recommandé d'évaluer les amplitudes articulaires actives et passives, la force musculaire et de réaliser des tests spécifiques. Pendant cet examen, il est important d'identifier les drapeaux rouges, qui signalent des problèmes nécessitant une référence médicale, ainsi que les drapeaux jaunes, qui orientent la sélection des interventions thérapeutiques.
Drapeaux rouges et jaunes
Les drapeaux rouges associés aux douleurs à l'épaule comprennent des signes tels qu'une déformation suspecte, un œdème important, un érythème cutané, des déficits sensitifs ou moteurs importants et inexpliqués, de la fièvre ou des frissons pouvant suggérer une atteinte cancéreuse, ainsi qu'une histoire ou une suspicion de cancer, des signes indiquant une atteinte cardio-vasculaire ou viscérale, et des signes suggérant une arthrite inflammatoire. Il est essentiel d'évaluer attentivement la présence de ces signes et symptômes chez le patient.
En ce qui concerne les drapeaux jaunes, ils représentent principalement des facteurs psychosociaux associés à un pronostic moins favorable. Cela inclut une durée prolongée des symptômes et une intensité élevée de la douleur, qui ont été démontrées comme étant liées à un pronostic défavorable. Les facteurs liés au travail, tels qu'une demande d'indemnisation tardive, la présence d'un litige ou d'une insatisfaction au travail, peuvent également indiquer un pronostic moins favorable. De plus, la détresse psychologique, l'anxiété, la kinésiophobie, le sentiment d'injustice lié à la lésion, le manque de soutien social et les responsabilités familiales sont des facteurs à prendre en considération lors de l'évaluation d'un patient présentant des douleurs à l'épaule.
La tendinopathie de la coiffe des rotateurs
La tendinopathie de la coiffe des rotateurs est la pathologie la plus courante à l'épaule, représentant entre 65 et 85 % des cas de douleurs à l'épaule. Ce terme englobe un continuum de lésions allant de la tendinose de la coiffe des rotateurs à la déchirure partielle de la coiffe des rotateurs. Il peut également inclure des diagnostics tels que la douleur sous-acromiale, le syndrome d'accrochage et la bursite sous-acromiale. Bien que ces conditions puissent représenter différentes pathologies, le terme de tendinopathie de la coiffe des rotateurs est utilisé car la prise en charge est souvent similaire pour toutes ces affections.
Lors du diagnostic en physiothérapie de la tendinopathie de la coiffe des rotateurs, il est recommandé de passer par les différentes étapes d'évaluation mentionnées précédemment. Cependant, certains auteurs ont identifié des tests spécifiques dont les résultats combinés peuvent fournir des indications quant à la présence de la pathologie. Ces indications sont généralement exprimées en termes de ratio de vraisemblance positive et négative.
Dans le cas de la tendinopathie de la coiffe des rotateurs, une combinaison de l'arc douloureux, du test de Hawkins-Kennedy et du test de l'infra-épineux peut fournir une bonne indication de la présence de cette pathologie. De plus, si ces tests donnent des résultats négatifs, il y a une probabilité raisonnable que la pathologie soit absente. Ainsi, ces tests peuvent être des outils précieux pour aider à confirmer le diagnostic de tendinopathie de la coiffe des rotateurs.
Dans le cas d'une tendinopathie de la coiffe des rotateurs, les recommandations cliniques suggèrent de ne pas recourir à une imagerie diagnostique en première intention. Cela est dû au risque de découvrir des anomalies fortuites qui pourraient entraîner des références inutiles et des délais dans la prise en charge, augmentant ainsi le risque de chronicité. De même, la référence pour une opinion chirurgicale n'est pas recommandée initialement.
En ce qui concerne la prise en charge médicamenteuse, l'acétaminophène et les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) sont recommandés, mais il est essentiel de prendre en considération les contre-indications du patient. Les infiltrations de corticostéroïdes ne sont pas recommandées en première intention, mais peuvent être utilisées si la douleur persiste malgré les autres traitements. Cependant, après deux infiltrations sans amélioration significative, une infiltration additionnelle n'est pas recommandée.
Pour la prise en charge en réadaptation, l'éducation du patient revêt une importance primordiale. Cela peut inclure des informations sur l'anatomie de l'épaule, la neurophysiologie de la douleur, la modification des activités, la gestion de la douleur, la gestion du stress et l'importance d'un mode de vie actif.
En physiothérapie, un programme de réadaptation actif est recommandé, comprenant des exercices de mobilité articulaire, de contrôle moteur, de renforcement et d'endurance. La thérapie manuelle peut également être bénéfique pour soulager la douleur et améliorer la fonction, idéalement combinée à un traitement actif. Cependant, l'électrothérapie n'est généralement pas recommandée dans la prise en charge de la tendinopathie de la coiffe des rotateurs.
La déchirure transfixiante de la coiffe des rotateurs
Pour la déchirure transfixiante ou déchirure complète de la coiffe des rotateurs, les outils diagnostiques et les ratios de vraisemblance jouent un rôle important. Pour une déchirure de la coiffe des rotateurs, le fait d'avoir un patient âgé de plus de 65 ans présentant une faiblesse en rotation externe et des douleurs nocturnes donne une bonne probabilité de déchirure de la coiffe des rotateurs. Cependant, un résultat négatif à ces tests ne permet pas d'exclure la pathologie.
Quant à la déchirure transfixiante de la coiffe des rotateurs, le fait d'avoir un patient âgé de plus de 60 ans avec un arc douloureux positif, un test du drop-arm positif et un test de l'infra-épineux positif suggère une bonne probabilité de diagnostic positif. En revanche, l'absence de ces facteurs donne une bonne indication que le patient n'a pas de déchirure transfixiante de la coiffe des rotateurs.
En cas de suspicion de déchirure transfixiante de la coiffe des rotateurs, notamment en présence d'un traumatisme, plusieurs mesures sont recommandées. Tout d'abord, il est conseillé de procéder à une imagerie pour confirmer le diagnostic. Ensuite, une référence à un orthopédiste pour une évaluation chirurgicale est recommandée lorsque la déchirure transfixiante est confirmée à l'imagerie et que le patient présente des douleurs, une incapacité ou une faiblesse musculaire importante.
Il est particulièrement important de référer rapidement les patients présentant des traumatismes, les jeunes patients, ceux qui ont des exigences physiques importantes au travail, ainsi que ceux chez qui l'imagerie montre une absence de signes de dégénérescence musculaire, comme l'absence d'infiltration graisseuse, et ceux ayant une rupture massive. La rapidité de la référence est essentielle pour garantir que ces patients bénéficient d'une chirurgie dans les meilleurs délais afin de minimiser les complications et la progression de la déchirure.
En termes de prise en charge des déchirures de la coiffe des rotateurs, la même médication que la tendinopathie de la coiffe est recommandée. Toutefois, il est important de noter que les infiltrations intra-articulaires de corticostéroïdes ne sont pas recommandées en première intention. Même si le patient est référé pour une imagerie et une consultation avec un spécialiste, il est crucial de fournir une éducation au patient et de lui proposer un programme de réadaptation active.
La capsulite rétractile
La capsulite rétractile, également connue sous le nom d'épaule gelée, présente des recommandations distinctes par rapport aux affections précédentes. Sa prévalence dans la population générale est de 2 à 5 %, mais elle peut atteindre jusqu'à 20 % chez les personnes diabétiques. Les femmes, surtout âgées de 40 à 65 ans, sont plus susceptibles d'être affectées. Les facteurs de risque de capsulite primaire, dite “idiopathique” incluent le diabète, les problèmes de thyroïde, la goutte, l'hyperlipidémie, la maladie de Parkinson et les antécédents de capsulite dans l'épaule opposée. Les cas de capsulite secondaire sont souvent associés à un traumatisme ou à une immobilisation.
La capsulite rétractile présente une présentation clinique souvent décrite en plusieurs phases, parfois en trois, parfois en quatre. Généralement, ces phases sont divisées en une phase chimique, caractérisée par une douleur prédominante par rapport à la raideur, et une phase mécanique, où la raideur devient plus prépondérante que la douleur.
La capsulite rétractile se manifeste par une progression de la douleur et de la raideur articulaire, limitant les activités quotidiennes et le sommeil. Il n'y a pas de tests spécifiques comme aux autres pathologies où une combinaison va nous donner des ratios de vraisemblance que la pathologie soit présente ou non. Les patients présentent généralement une perte progressive de la rotation externe passive et de la mobilité dans d'autres mouvements, tels que l'abduction et la rotation interne. Le diagnostic différentiel est crucial parce qu'on sait qu’elle peut être confondue avec une tendinopathie aiguë comme il y a peu de perte de mobilité articulaire au début de la capsulite. L'histoire du patient est également très importante pour exclure les traumatismes graves et les maladies sévères, comme les néoplasmes. On peut, par contre, faire une palpation qui va nous permettre d'identifier des crépitements qui seraient indicateurs d'ostéoarthrose. L'imagerie médicale peut être controversée, certaines recommandations suggèrent de ne pas en faire, tandis que d'autres indiquent qu'une radiographie négative peut contribuer au diagnostic en éliminant d'autres pathologies telles que l'arthrose. Un nouveau guide de pratique clinique sur la capsulite est en préparation dans le JOSPT, ce qui pourrait clarifier les recommandations concernant l'imagerie médicale pour cette condition.
Pour la capsulite rétractile, les traitements médicaux recommandés incluent l'analgésie avec de l'acétaminophène et des anti-inflammatoires non-stéroïdiens oraux. Les infiltrations de cortico-stéroïdes intra-articulaires sont préconisées précocement, idéalement pendant la phase chimique pour limiter la perte de mobilité. La chirurgie, telle que la manipulation sous anesthésie et l'arthrolyse capsulaire, est réservée aux cas de traitement non-chirurgical infructueux. La physiothérapie, comprenant l'éducation du patient, des exercices supervisés et de la mobilité à domicile, ainsi que la thérapie manuelle, peut être bénéfique. Il est essentiel de noter que la capsulite rétractile a souvent une évolution naturelle sur deux ans et que les interventions, outre l’infiltration, vont plus ou moins modifier le pronostic à long terme. L'accent est donc mis sur l'éducation du patient, la prescription d'exercices à domicile et la gestion de cette pathologie qui a une certaine évolution naturelle.
L'instabilité gléno-humérale antérieure
Finalement pour l'instabilité antérieure gléno-humérale, c'est la luxation la plus fréquente de l'articulation, représentant 45% de toutes les luxations corporelles, sachant que 95% de toutes les instabilités gléno-humérales sont antérieures. La récurrence de la luxation antérieure est courante, avec un taux de 39%, et les hommes de moins de 40 ans présentant une hyperlaxité sont particulièrement à risque de récidive.
En ce qui concerne la prise en charge médicale, une imagerie diagnostique est recommandée dans deux situations : premièrement, après une première luxation antérieure traumatique chez un jeune patient à risque de récidive, et deuxièmement, en cas de luxation récurrente. L'objectif est d'identifier rapidement les patients pour lesquels une intervention chirurgicale pourrait être nécessaire afin de prévenir de nouvelles luxations et des lésions osseuses plus graves.
En ce qui concerne les traitements médicaux et de réadaptation, en cas de douleur, l'administration d'acétaminophène et d'anti-inflammatoires non-stéroïdiens oraux peut être recommandée. Pour le traitement conservateur, l'éducation du patient est primordiale. En cas de proximité avec le traumatisme, une immobilisation peut être suggérée, avec un programme de réadaptation actif pour favoriser la récupération.
Conclusion
En résumé, lors de l'évaluation clinique initiale des problèmes d'épaule, il est recommandé d'examiner les antécédents médicaux, l'historique de la blessure et de procéder à une évaluation subjective et objective. Dans la plupart des cas, l'imagerie diagnostique n'est pas recommandée en première intention, sauf en cas de traumatisme. De même, la référence pour une intervention chirurgicale n'est généralement pas recommandée en première intention. En ce qui concerne le traitement médical, l'utilisation d'acétaminophène et d'anti-inflammatoires non-stéroïdiens par voie orale est recommandée, tandis que les infiltrations de corticostéroïdes sont généralement évitées en première intention. Pour la prise en charge en physiothérapie, il est recommandé de fournir une éducation au patient, un traitement de physiothérapie et des exercices actifs.